sécurité sociale
S’il est peu question de consommation dans la déclaration adoptée par la Conférence générale de l’Organisation internationale du Travail (OIT) – une seule occurrence – il nous a pourtant semblé opportun de la republier ici. Non pas simplement pour déplorer la désuétude de ses principes, battus en brèche par la montée en puissance des dynamiques actionnariales au sein des entreprises, mais pour souligner l’importance des enjeux indissociables que recoupe le problème de la consommation, à commencer par celui du travail.
A l’ère de l’e-santé, le serment d’Hippocrate semble bel et bien dépassé : l’indépendance du médecin, sa fidélité aux lois de l’honneur et de la probité, ou encore son respect du secret des patients font pâle figure face aux logiques de profit des entreprises privées qui s’implantent dans le secteur de la santé. Le service public de santé français n’a pas échappé à la quantification du monde portée par les acteurs économiques de la révolution numérique. Dans cet article, Audrey et Simon Woillet montrent les enjeux et les dangers du basculement du système français dans un marché des services et des biens de santé, stimulé par la croissance des technologies liées aux Big Data : marchandisation des données médicales, surveillance individuelle des patients, porosité accrue de la frontière entre soin et commerce, etc.
Passage à un système par points, système à cotisations définies avec un taux bloqué à son niveau actuel, disparition des points de repère collectifs (âge d’ouverture du droit, durée de cotisations, taux de remplacement), ou encore financement de la solidarité par l’impôt, constituent autant d’orientations qui vont inéluctablement diminuer le montant des pensions de retraite. Pierre-Yves Chanu revient ici sur les dangers de la réforme Macron et sur la dégradation programmée des retraites par répartition.
La prétendue amélioration de la situation sociale et sanitaire en Grèce est une fiction du gouvernement grec, des institutions européennes et des médias dominants. La poursuite de l’application des recettes néolibérales mène à la faillite de l’État social et à la pérennisation de la précarité. Emmanuel Kosadinos nous dresse un bilan de la situation dans ce laboratoire européen du néolibéralime et incite, l’ensemble des pays européens, à en tirer les leçons.
À travers le regard de l’un des derniers « poilus » de la Sécu, le film La Sociale revient, sur la création de notre système de sécurité sociale. Condensé d’émotions, éveilleur de conscience, outil d’éducation populaire unique, le film a soulevé l’enthousiasme autour de ce « vieux projet d’avenir » qu’est la Sécu. Jérémie Pottier-Grosman nous fait partager son expérience et nous explique à quel point les débats autour de ce film ont rendu compte de convictions communes, d’engagements à peine ensommeillés ne demandant qu’à renaître.
Au cours des débats devant la seconde Assemblée constituante élue le 2 juin 1946, Ambroise Croizat, Ministre du Travail et de la Sécurité sociale, prononce un discours sur l’application de la loi sur la Sécurité sociale.
Hérités de la colonisation, les systèmes de protection sociale en Afrique subsaharienne ne concernent, au moment de l’indépendance, que les travailleurs des secteurs publics. Élargis par la suite aux travailleurs du secteur privé formel non agricole, ils restent souvent non accessibles à une grande majorité de la population. Néanmoins, avec l’échec des politiques néolibérales imposées par les institutions financières internationales, des mesures ont été mises en place dans nombre de pays africains qui ont intégré la Couverture sanitaire universelle pour objectif. Félix Atchadé nous replace cette histoire dans son contexte, nous propose un rapide état des lieux et ouvre des pistes pour permettre le développement d’une véritable sécurité sociale dans cette région du monde
Attaquée depuis les origines, la sécurité sociale est souvent accusée de trop peser sur le « coût du travail » et de constituer ainsi un frein à la compétitivité. La campagne pour accréditer l’idée qu’elle serait un choix de société dépassé et coûtant trop cher est puissante. La sécurité sociale a pourtant joué un rôle considérable dans l’amélioration des conditions de vie du plus grand nombre, dans l’atténuation de la peur du lendemain et dans l’allongement de la durée de vie. Elle est un vecteur fondamental de l’épanouissement humain et du développement de nos sociétés. Appréhendée comme un commun et largement démocratisée, elle constitue un dispositif fondamental pour répondre aux nouveaux défis que l’humanité doit affronter.
Entretien avec Pierre Dharréville.
Alors qu’elle est la plus grande invention sociale du XXe siècle, la Sécurité sociale est mise à mal par des injonctions d’ordre financier. Entre la pression du patronat pour l’augmentation de la CSG, la progressive diminution des cotisations et la pression d’une dette largement fabriquée, la question de la réponse aux besoins peine à s’imposer dans le débat politique. L’amenuisement des moyens et la multiplication des fermetures d’établissements accroissent la souffrance au travail des soignants et empêchent de faire face convenablement aux défis sanitaires. Le diagnostic est pourtant simple : on consacre une part trop faible des richesses produites à notre santé. Pierre Dharréville veut faire porter la voix de celles et ceux « qui ont besoin d’une sécurité sociale forte et solidaire », et appelle à une appropriation sociale de cet enjeu majeur.
Les fondateurs de la sécurité sociale ont assis son financement sur la richesse produite dans l’entreprise. La cotisation sociale incarne ce prélèvement sur la richesse qui finance la réponse à un besoin social et non les profits. C’est un choix politique qui a été fait en 1945. Cela permet de comprendre pourquoi la sécurité sociale a été, dès sa création, attaquée violemment par le patronat. Mais aussi pourquoi les politiques de baisse du « coût du travail » visent avant tout à réduire la part de la cotisation sociale dans le financement de la sécurité sociale et à amplifier la fiscalisation de ce financement, qui repose, elle, essentiellement sur les revenus des ménages. À partir d’une lecture de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, Frédéric Rauch explique en quoi cette évolution de la structure de financement participe d’une refonte libérale de notre système de sécurité sociale. Il nous invite à mener la bataille idéologique pour défendre et promouvoir notre modèle social.