Outil d’émancipation et de création de lien social, le sport devrait être au cœur du développement de la Métropole du Grand Paris. Mais il est, à ce jour, largement absent de la réflexion. Les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 offrent pourtant une opportunité exceptionnelle de déploiement de politiques sportives à cette échelle territoriale. La réduction des inégalités dans la répartition des équipements sportifs sur le territoire du Grand Paris, la réhabilitation ou la restructuration d’équipements vieillissants comme la création d’équipements au plus près des zones d’emplois, constituent autant de pistes avancées par Nicolas Bonnet pour faciliter la pratique du sport pour toutes et tous.
Le sport est le grand absent de la réflexion de la Métropole du Grand Paris. Peu incarnée par un Vice-Président transparent, cette politique non obligatoire ne fait qu’accompagner les décisions prises à d’autres niveaux : État, région, départements, territoires et communes. Le sport, comme la culture, peut et doit être au cœur du développement de la Métropole. Ce sont surtout les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 qui sont les moteurs du développement du sport dans la Métropole, incarnée par la réalisation de la piscine olympique dont la métropole serait chef de file. On pourrait espérer mieux comme politique publique en matière de développement du sport pour toutes et tous à l’approche des Jeux olympiques et paralympiques, dont l’effet sera certainement l’augmentation du nombre de pratiquants.
Une demande importante d’équipements sportifs, mais une offre trop faible et mal répartie
En plein débat sur le schéma de cohérence territorial (SCOT)[1], la contribution parisienne fait la part belle au développement du sport. Elle inscrit sa démarche dans la lutte contre les inégalités qui frappent les habitant-es de la métropole. L’exemple de l’accès aux équipements sportifs est édifiant. La densité d’équipements au km², bien qu’importante en valeur dans le cœur de la métropole, est extrêmement faible au regard du taux d’équipement par habitant si on le compare au reste de la région ou du pays. Au sein du Grand Paris, un peu plus de 50 % des habitants pratiquent régulièrement une activité physique et sportive, alors que ce taux peut dépasser les 65 % dans d’autres départements franciliens.
Par ailleurs, certaines zones de la métropole se trouvent également sous-dotées dans plusieurs disciplines. De nombreux publics sont éloignés de la pratique sportive : les femmes, les personnes en situation de handicap, les seniors, les catégories socio-professionnelles modestes… En opposition, la métropole génère l’un des plus grands nombres de licenciés sportifs et les meilleurs résultats sportifs professionnels. La demande existe et est importante, mais l’offre est donc encore trop faible et mal répartie.
La métropole peut utiliser le levier sportif comme outil d’émancipation, de création de lien social, d’amélioration des conditions physiques et d’engagement bénévole, notamment dans les quartiers populaires. Les Jeux olympiques et paralympiques doivent permettre de mettre le sport au service du territoire et des habitants. La construction du projet olympique est une opportunité exceptionnelle de déploiement de politiques sportives à l’échelle métropolitaine.
Le besoin d’un plan métropolitain de rattrapage des équipements sportifs
Les handicaps de notre métropole sont connus : le manque cruel d’espace, des choix d’investissements qui sacrifient trop souvent les équipements sportifs, des inégalités économiques qui pénalisent bon nombre de nos concitoyen-nes dans l’accès à la pratique sportive. La priorité doit donc être à un plan métropolitain de rattrapage des équipements sportifs essentiels à la pratique du sport pour toutes et tous. Paris et la Seine Saint-Denis, terre d’accueil des Jeux olympiques et paralympiques, sont en queue de peloton pour le nombre d’équipements. Des piscines manquent, de trop nombreux enfants ne savent pas nager. Les piscines, stades et gymnases sont pour beaucoup vieillissants et réclament des réhabilitations ou des restructurations lourdes.
À cela il faut rajouter que, si nombre de communes ont fait des efforts importants en matière d’équipement pendant des décennies, les décisions des gouvernements successifs de baisser les dotations ont durablement freiné la volonté d’investissement des collectivités locales. Moins d’argent, moins d’investissement, moins d’investissement, moins d’équipements, l’équation est simple. L’anémie du budget du Ministère en charge des sports et la stagnation des fonds du Centre national pour le développement du sport (CNDS) parachèvent le tableau.
Si la Métropole a un avenir, c’est qu’elle aura su travailler avec l’ensemble des communes, des territoires, des départements et de la région. Si le projet du gouvernement est de bousculer complètement l’organisation territoriale dans le cœur de l’Île-de-France, alors on ira vers un échec. Tous les gouvernements qui ont tenté d’imposer une Métropole « par le haut » une Métropole omnipotente se sont cassé les dents sur l’attachement des populations à leur commune ou à leur département.
La Métropole c’est d’abord un vécu des habitant-es avant d’être une structure politico administrative. On vit et on travaille dans la Métropole, on pratique un sport, on fréquente les équipements, on a accès à des centaines de musées ou de lieux patrimoniaux, on va au concert ou au théâtre, au cinéma. On le fait sans penser que nous sommes dans une Métropole. D’où l’importance de concevoir la Métropole autrement, afin de faciliter la mobilité et les échanges.
Temps «rétréci» et cherté de la vie: des obstacles à la pratique du sport
L’éloignement entre le lieu de vie et le lieu de travail continue de peser sur la vie des salariés et leur accès aux loisirs : fatigue, vie familiale et sociale désorganisée. C’est malheureusement le sport, la culture, les loisirs qui font les frais de ce temps « rétréci », sans compter la baisse du pouvoir d’achat. Vivre dans une Métropole chère pèse sur les dépenses ressenties comme non obligatoires.
Une Métropole qui pense son territoire dans un rééquilibrage entre les lieux d’habitations et les lieux d’activité est une Métropole dynamique. Il est nécessaire d’offrir à nouveau la possibilité de création d’équipements sportifs au plus près des zones d’emplois. Les investisseurs privés ne s’y sont pas trompés. Nombre de salles de gym ou de musculation, de foot en salle, de squash se sont installées dans ces lieux de grande concentration d’emplois. Il est temps que les pouvoirs publics locaux et les entreprises dialoguent à nouveau pour établir des diagnostiques territoriaux et envisagent de créer des équipements utiles aux salarié-es et aux habitant-es qui n’ont pas forcément le même temps de vie et de loisirs. Demander une participation aux Comités d’Entreprises ou aux entreprises elles-mêmes au fonctionnement voire aux investissements ne m’apparaît pas scandaleux. Ce serait une forme utile d’optimisation des équipements. Des expériences existent, la Métropole à son échelon doit les amplifier et les généraliser.
Faire du SCOT une forme de planification intelligente
C’est tout l’objet du débat sur le SCOT qui doit devenir une forme de planification intelligente. C’est-à-dire réfléchir par bassin de vie, combien d’équipements manquent, combien d’enfants, de jeunes, d’adultes sont exclus des pratiques sportives, du fait de ce manque ? La Métropole doit quitter sa logique de saupoudrage. Elle doit se concentrer sur l’aide à l’investissement dans le seul objectif de la réduction des inégalités. Elle ne doit pas hésiter à établir des critères qui feront qu’elle aidera plus Aubervilliers que Puteaux. Les écarts entre les ressources des villes de la Métropole sont criants. Elles le sont en matière d’équipements sportifs, comme de logement ou d’emploi. Un projet Métropolitain digne de ce nom est possible sans rajouter une couche au « mille-feuille » administratif. Il faut choisir soit la subsidiarité, soit la coopération. Ce dernier choix est le nôtre.
C’est à ce prix, dans une logique de complémentarité des financements de « discrimination positive » à l’égard de ceux qui ont peu que l’on pourra voir l’utilité de la Métropole. Sinon il y a fort à penser que rien ne changera et comme dit l’adage « il pleuvra toujours où c’est mouillé ».