Octobre 20217 min

Lamine Senghor (1889-1927), militant anticolonialiste et communiste de la première heure, traqué par les services de renseignement français, il rejoint en 1924 l’Union intercoloniale, affiliée au PCF, où il échange avec d’autres figures du combat anticolonialiste international comme Hô Chi Minh (Indochine) et Messali Hadj (Algérie). Dans la foulée de sa démission du PCF, il fonde en 1926 le Comité de défense de la race nègre (CDRN), première association en France appelant ouvertement à l’autodétermination des Africains sous domination coloniale, dont la fraction communiste donnera, par la suite, naissance à la Ligue de défense de la race nègre (LDRN). L’année suivante, il participe à la conférence inaugurale de la Ligue contre l’impérialisme à Bruxelles et publie un pamphlet prophétique, La violation d’un pays, sur la libération des peuples du capitalisme et de l’impérialisme. Souffrant de la tuberculose depuis l’attaque de Verdun, il meurt à Fréjus en novembre 1927 à l’âge de 38 ans.

En savoir plus:

• Lamine Senghor, La violation d’un pays, et autres écrits anticolonialistes, (présentation de David Murphy), L’Harmattan, 2012.
• David Murphy, «Tirailleur, facteur, anticolonialiste: la courte vie militante de Lamine Senghor (1924-1927)», Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 2015.

Contre le couvre-feu instauré le 5 octobre 1961 pour les seuls Nord-Africains. La sanglante répression de la manifestation lancée à l’initiative de la Fédération française du Front de libération nationale (FLN) fut longtemps occultée par volonté politique des acteurs de l’époque – Maurice Papon, Michel Debré (Premier ministre), Roger Frey (ministre de l’Intérieur), le général de Gaulle – ainsi que par la mémoire de la répression sanglante d’une autre manifestation, celle de Charonne contre les attentats de l’Organisation de l’armée secrète (OAS), le 8 février 1962. Avec le Service de coordination des affaires algériennes (SCAA) et la Force de police auxiliaire (FPA), le préfet Papon mit en place un système de répression extrajudiciaire et des forces spéciales agissant dans le secret et l’illégalité pour s’attaquer au FLN.

En savoir plus:

• Histoire et mémoires de la manifestation du 17 octobre 1961 à Paris, dossier thématique du Musée de l’Histoire de l’immigration réalisé par Mogniss H. Abdallah, Joy Banerjee, Emmanuel Blanchard et Anne Volery, oct. 2021.
• Gilles Manceron, «Comment le massacre colonial du 17 octobre 1961 fut préparé au sein de l’État» (extrait publié par la revue Contretemps du texte intitulé «La triple occultation d’un massacre», qui accompagne le livre de Marcel Péju et Paulette Péju, Le 17 octobre des Algériens, La Découverte, octobre 2021.
• «Le 17 Octobre 1961: un tabou de l’histoire», Là-bas si j’y suis, émission avec Jean-Luc Einaudi, Benjamin Stora, Mehdi Lalaoui, Didier Daeninckx, février 2007.

Un compromis de Poutine avec les oligarques. Littéralement «accord brochette», il fait référence au pacte conclu entre Vladimir Poutine à son arrivée au pouvoir et l’oligarchie sortie affaiblie du krach financier de 1998. Les oligarques renoncent à tout rôle politique en échange d’une amnistie sur le grand rapt des années 1990 et de la sécurité dans la poursuite de leurs affaires. Ceux qui refusent cet accord s’exilent.

En savoir plus:

• Vincent Boulet, «De quoi le “poutinisme” est-il le nom?», La Pensée, N°405, janvier-mars 2021.

Mycélium. Pour les spécialistes des forêts, le mycélium qui forme un réseau sous-terrain hyper dense permet aux arbres de s’envoyer des signaux sous forme d’impulsion électrique via leurs racines puis ces filaments. Alertés, les arbres peuvent par exemple se mettre à fabriquer des anticorps pour rendre leurs feuilles immangeables et se protéger d’animaux ou d’insectes. Le mycélium constitue la face cachée de la symbiose et exerce de puissantes influences sur le cyclage biogéochimique, la composition des communautés végétales et le fonctionnement des écosystèmes.

En savoir plus:

• Mathieu Vidard, «Wood Wide Web, l’internet des sous-bois», France inter, 14 octobre 2019.
• «Comment les arbres communiquent entre eux: découvrez le “réseau internet” de la forêt», France info, 6 mars 2019.
• Yohan Demeure, «L’incroyable intelligence en réseau des champignons», sciencepost.fr, 23 octobre 2014.

L’injonction faite au gouvernement de réparer d’ici le 31 décembre 2022 le préjudice écologique dû au non-respect de ses engagements. Le tribunal administratif de Paris ordonne donc au Premier ministre et aux ministres compétents de prendre toutes les mesures utiles afin de réparer ce préjudice et de prévenir l’aggravation des dommages. À ce stade, le juge n’assortit pas cette injonction d’une astreinte à la différence de la décision du Conseil d’État du 20 juillet 2020 qui a ordonné au Gouvernement de prendre des mesures pour réduire la pollution de l’air, sous peine d’une astreinte de 10 millions € par semestre de retard ; astreinte que l’État a été condamné à payer en août 2021 le Conseil d’État estimant que les mesures prises ne permettront pas d’améliorer la situation dans le délai le plus court possible. Ces condamnations s’ajoutent à une autre décision du Conseil d’État, saisi par la commune de Grande-Synthe, qui enjoint au gouvernement de prendre des mesures supplémentaires d’ici le 31 mars 2022 pour infléchir la courbe des émissions de gaz à effet de serre.

En savoir plus:

• «L’affaire du Siècle: l’État devra réparer le préjudice écologique», Communiqué de presse du Tribunal administratif, 14 oct. 2021.
• «Quand la justice administrative rappelle l’État à ses engagements climatiques», décryptage du Conseil d’État, 7 mai 2021.
• «Pollution de l’air: le Conseil d’État condamne l’État à payer 10 millions d’euros», Conseil d’État, 4 août 2021.
• Emilio Meslet, «Justice. L’Affaire du siècle, ses clics et sa claque», L’Humanité, 15 octobre 2021.

Les trois. En France, plus de trois enfants sur quatre respirent un air pollué, en ville essentiellement. À Paris, les habitants les plus pauvres risquent trois fois plus de mourir d’un épisode de pollution que les plus riches. Ils cumulent plusieurs expositions néfastes (pollution de l’air extérieur, pollution de l’air intérieur, plus forte exposition au bruit, à la chaleur, etc.), car ils peuvent plus difficilement se soustraire à des conditions de vie défavorables faute de ressources suffisantes. Les effets de la pollution de l’air sont documentés: l’asthme explose, sa prévalence chez les enfants a ainsi augmenté de 12% entre 2005 et 2012. D’autres allergies, notamment alimentaires se multiplient ainsi que des pathologies telles que le diabète, l’obésité ou la dépression. Les enfants sont particulièrement touchés en raison notamment de l’immaturité de leurs organismes et de leur fréquence respiratoire. Leur santé va être affectée tout long de leur vie d’adulte.
Cette étude inédite recommande ainsi que les politiques publiques incluent davantage la vulnérabilité des plus pauvres et les inégalités sociales dans la lutte contre les pollutions et la santé environnementale.

En savoir plus:

• De l’injustice dans l’air. Pauvreté des enfants et pollution de l’air, Unicef, Réseau action climat, oct. 2021, 48 p.
• «Pollution de l’air et inégalités sociales: 10 informations à retenir», Réseau Action Climat, 14 oct. 2021.
• Pia de Quatrebarbes, «Pollution atmosphérique. Pauvres ou riches, on ne respire pas le même air», L’Humanité, 14 Octobre 2021.

Pablo Picasso (1881-1973). Sur une photo, on le voit s’entretenir avec Jacques Duclos (1896-1975), l’un des principaux dirigeants du parti de l’époque, et Marcel Cachin (1869-1958), directeur historique de l’Humanité. Picasso, âgé de 63 ans, est au zénith de sa gloire. Le 29 octobre, l’Humanité publie le célèbre texte du peintre : «Mon adhésion au Parti communiste est la suite logique de toute ma vie, de toute mon œuvre. Car, je suis fier de le dire, je n’ai jamais considéré la peinture comme un art de simple agrément, de distraction; j’ai voulu, par le dessin et la couleur, puisque c’étaient là mes armes, pénétrer toujours plus avant dans la connaissance des hommes et du monde afin que cette connaissance nous libère tous chaque jour davantage».

En savoir plus:

• Humanité, 5 oct. 1944 (disponible sur Gallica).
• Humanité, 29 oct. 1944.
• Pablo Picasso dans le Maitron.
• «Picasso a apporté son adhésion au PCF», Humanité, 10 août 2016.

Natha Caputo (1904-1967). De 1956 à 1967, elle a été la cheville ouvrière de la présentation des livres pour enfants dans la revue L’école et la Nation du PCF dont elle n’était pas membre. Cette rubrique, initiée par Paulette Charbonnel, a acquis sa renommée avec Natha Caputo, devenant un repère pour les pédagogues et les parents. Ces compte-rendus ont été repris dans un Guide des lectures pour l’enfance qui a longtemps fait référence, mis en forme par Bernard Épin. Ce dernier a pris la responsabilité de la rubrique par la suite. Natha Caputo est aussi l’auteure de plusieurs ouvrages, dont l’album Roule galette (illustré par Pierre Belvès), adaptation d’un conte russe traditionnel, publié aux éditions du Père Castor créées par Paul Fauché en 1931. Ce dernier appartenait au mouvement d’éducation nouvelle qui voulait que l’enfant soit actif dans l’apprentissage de sa lecture.

En savoir plus:

• «La rubrique de critique de livres et d’arts pour la jeunesse dans L’École et la Nation», séance du séminaire en lien avec la mise en ligne de la revue L’école et la Nation, 29 juin 2021.
• «Livres pour enfants: pourquoi faut-il relire “Roule galette”?», France inter, 18 juin 2020.

1955. Publié pour la première fois à Paris en 1955, Lolita fit scandale en raison du sujet traité dans ce roman: le personnage principal et narrateur est un pédocriminel qui profite de la vulnérabilité d’une jeune fille de 12 ans pour lui imposer ses fantasmes. Souvent mal lu, mal interprété, ce livre fut considéré par certains comme une apologie honteuse de la pédocriminalité tandis que d’autres ont voulu y lire une légitimation des actes pédocriminels. À tel point que le terme de «nymphette» et le prénom «Lolita» désignent maintenant, dans l’imaginaire collectif, une jeune fille séductrice qui nourrit et entretient les fantasmes d’hommes plus âgés. Le documentaire produit récemment par Arte sur l’histoire de ce roman et les lectures qui en ont été faites réhabilite le propos de son auteur qui est tout autant une condamnation de la pédocriminalité qu’un examen psychologique minutieux de la psyché de son personnage.

En savoir plus:

• «Lolita», méprise sur un fantasme, documentaire réalisé par Olivia Mokiejewski, 2021, 55 min. (en libre accès sur Arte jusqu’au 13 mars 2022).

Retirer Anguilla, la Dominique et les Seychelles de la liste noire des paradis fiscaux pour les inscrire sur la liste grise des États « coopératifs » qui se sont engagés à mettre en œuvre les principes de bonne gouvernance fiscale. Cette liste noire européenne ne comprend donc plus que neuf États ou territoires qui pratiquent une fiscalité réduite ou nulle et des avantages fiscaux sans exiger d’activité réelle sur place, et dont les juridictions fiscales jugées « non coopératives » continuent d’assurer le secret fiscal. Ne figure, par exemple, sur la liste qu’un seul des 17 paradis fiscaux où opèrent les banques de l’UE. En France, la liste noire compte 13 pays. L’ONG Oxfam a établi une liste objective de 58 paradis fiscaux. D’après l’estimation de l’OCDE reprise par les Pandora Papers, 11 300 milliards de dollars manquent ainsi aux budgets des États pour assurer la satisfaction des besoins fondamentaux (alimentation, santé, éducation), affronter les défis du changement climatique et de justice sociale.

En savoir plus :

• Julien Desiderio, «Les assistés fiscaux, une espèce protégée», Le Soir, 12 octobre 2021.
• Louis Mollier-Sabet, «Pandora Papers : “Il faut sortir de l’hypocrisie dans la lutte contre l’évasion fiscale”, accuse Éric Bocquet», Public Sénat, 4 octobre 2021.
• «Paradis fiscal: définition et liste des pays», Oxfam, 29 novembre 2020.

Célestin Freinet (1896-1966) développe avec son épouse, Élise Freinet, également institutrice et communiste, un ensemble de techniques pédagogiques parties prenantes du mouvement de l’éducation nouvelle. Nommé instituteur en 1920, il rend compte de ses expériences scolaires dans la revue l’École émancipée animée entre 1921 et 1936 par des militants de la Fédération unitaire de l’enseignement de la CGTU. L’installation d’un atelier d’imprimerie dans l’école permet aux élèves de fabriquer ensemble leur «livre de vie», composé des résumés de leçons entendues et de leurs textes, librement rédigés et imprimés, qui circulent ainsi de classe en classe. Après sa marginalisation de l’enseignement public, Célestin Freinet ouvre une école privée à Vence en 1935 et fonde en 1947 l’Institut coopératif de l’école moderne.

En savoir plus:

• Catherine Chabrun, «Cohérence de la pédagogie Freinet», Silomag, n°8, avril 2019.
• Véronique Decker, Pour une école publique émancipatrice, Paris, Libertalia, 2019, 144 p.
• Emmanuel Saint-Fuscien, Célestin Freinet. Un pédagogue en guerres (1914-1945), Paris, Perrin, 2017, 256 p.
• Jacques Mondoloni, Les enfants de Freinet, Paris, Le Temps des Cerises, 2009, 188 p.

84,1%. Dans les années 1950, la norme est celle d’un salaire de base fixe et collectif, reposant sur les grilles de classification. Il est régulièrement augmenté, sous la double influence de l’ancienneté et des hausses générales de salaires. À partir des années 2000, on observe un mouvement de complexification et de diversification des pratiques de rémunération. Les managers usent de la part variable comme d’un outil de mobilisation des salarié·es favorisant l’avènement d’un travailleur autonome et responsable. Au service d’un idéal méritocratique, leurs rémunérations seraient à la hauteur de leur travail et de leurs efforts. Le déploiement des rémunérations variables opère ainsi un report des risques et des contraintes sur les salarié·es dorénavant chargé·es de «faire leur salaire». On assiste à une remontée de l’incertitude qui s’opère au cœur même du salariat stable.

En savoir plus:

• «La structure des rémunérations dans le secteur privé en 2016», Dares résultats, déc. 2019, n° 063.
• «Faire son salaire», La suite dans les idées, émission de Sylvain Bourmeau, mars 2020, 45 min.
• Sophie Bernard, Le nouvel esprit du salariat, PUF, 2020, 244 p.
• «Les rémunérations variables favorisent le passage de l’exploitation à l’auto-exploitation», Tribune de Sophie Bernard, Le Monde, 14 oct. 2021.

Le premier besoin vital. Aux yeux de Marx (1818-1883), la sphère du travail n’est pas condamnée à demeurer un lieu d’aliénation et d’exploitation comme elle l’est sous le mode de production capitaliste, elle est au contraire appelée à devenir le lieu par excellence de l’émancipation humaine. Il ne s’agit plus alors seulement de gagner son pain à la sueur de son front : retrouver une souveraineté sur le travail, c’est par la même occasion redonner du sens à cette activité créatrice par laquelle l’être humain façonne le monde qui l’entoure.

En savoir plus:

• «Travail, pourquoi Marx avait raison», Travailler au futur (TAF), Hors-série, août 2021.
• Florian Gulli, Jean Quétier, Découvrir Marx, Ed. sociale, oct 2020.
• Suivre les travaux de la Grande édition Marx et Engels (GEME).

La loi Gayssot du nom du député communiste Jean-Claude Gayssot, qui fut son initiateur. Elle confirme une loi antérieure de 1972, la loi Pléven relative à la lutte contre le racisme. Elle innove dans le fait qu’elle qualifie de délit, la contestation de l’existence des crimes contre l’humanité tels qu’ils furent définis dans le statut du Tribunal de Nuremberg. Elle permet en outre aux associations antiracistes de se porter partie civile. Le secrétaire national du PCF et député du Nord Fabien Roussel a demandé que la loi soit modifiée pour inclure l’inéligibilité de personnes condamnées pour de tels délits. Aujourd’hui la peine complémentaire» d’inéligibilité n’est prononcée que si elle explicitement demandée dans la condamnation formulée par les juges.

En savoir plus:

• Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe.
• «Présidentielle 2022. Contre l’extrême droite, Fabien Roussel brandit la loi Gayssot», L’Humanité, 12 oct. 2021.
• Fiche pédagogique avec une vidéo sur le site enseignants.lumni.fr

Une représentation plus ou moins imaginaire des réponses des personnes interrogées. Les entreprises de sondage prétendent donner des photographies ou baromètres de l’opinion publique. Pour cela, ils s’efforcent de constituer des échantillons représentatifs d’une population. En réalité, ces échantillons sont affectés de divers biais : des biais de sélection c’est-à-dire des biais inhérents à la méthode choisie pour démarcher les personnes interrogées (ex : non-accès ou difficultés d’accès à Internet pour les sondages en ligne) ; des biais d’auto-sélection, c’est-à-dire la tendance de nombreuses personnes à décliner l’invitation à répondre (pas le temps, méfiance, sentiment d’incompétence, etc.) ; des biais de déclaration, c’est-à-dire les hésitations à déclarer certaines opinions ou votes, comme la sous-déclaration de l’abstention. Les entreprises de sondage doivent donc procéder à des redressements pour tenter de corriger ces biais ; opérations délicates qui peuvent être entachées d’erreur. Par ailleurs, certains sondages d’opinion posent aux personnes interrogées des questions qu’elles ne se sont jamais posées., celles-ci répondant alors plus ou moins au hasard ou à partir de leur compréhension de la question qui peut s’écarter du sens donner par les sondeurs, commanditaires et commentateurs.
Le problème est que ces représentations plus ou moins imaginaires peuvent produire des effets politiques.

En savoir plus:

• Daniel Gaxie, Sondages: précautions avant usages, Fondation Gabriel Péri, 2019.
• Les sondages font-ils la politique, Le temps du débat, France Culture, 29 sept. 2021.
• Sarah Brethes et Antton Rouget, «Les sondages: toujours moins fiables, mais toujours plus décisifs», Mediapart, 20 oct. 2021.

28,4% ! Clémence Perronnet, dans le cadre de sa thèse, a travaillé sur le goût des enfants pour les sciences. Alors que les disciplines scientifiques sont souvent réputées plus égalitaires que les matières littéraires, elle démontre comment ces disciplines attisent en fait les inégalités et explorent les processus d’exclusion et de censure sociale qui touchent avant tout les filles et les enfants des classes populaires. Elle appelle à combattre l’idée qu’il existerait une différence naturelle entre les sexes et les cultures («pas doués pour les maths»), à faire réapparaître des figures féminines dans l’histoire des sciences ou encore à privilégier des femmes pour représenter la réussite scientifique etc. Elle invite aussi à travailler sur les représentations scientifiques, car la rhétorique du génie, de la performance et de la compétitivité en sciences – particulièrement en maths – contribue au développement des inégalités. L’étude montre que 41% des élèves issus des classes sociales favorisées sont dans les filières scientifiques contre 10% pour les classes défavorisées.

En savoir plus:

• Les femmes et les sciences… au-delà des idées reçues, livret a été conçu par l’association Femmes & Sciences, en partenariat avec les associations femmes et mathématiques et
  Femmes Ingénieurs, juillet 2019.
• Clémence Perronnet, La bosse des maths n’existe pas. Rétablir l’égalité des chances dans les matières scientifiques, Autrement, 2021.
• «Il faut lutter contre les inégalités d’accès aux sciences pour produire des connaissances plus vraies, plus justes», entretien avec Clémence Perronnet, Le Monde, 25 sept. 2021.

Le paléolithique supérieur (-35 000 à -9 500 ans). Dans le documentaire, une trentaine de scientifiques du monde entier – paléontologues, ethnologues, généticiens… – ont été interrogés pour faire le point de leurs découvertes sur la place des femmes durant le paléolithique supérieur. Lady Sapiens appartient à une tribu de chasseurs-cueilleurs nomades. Loin du cliché de femme soumise attendant le retour des vaillants chasseurs en s’occupant des enfants, elle serait à la fois athlétique et féminine. Elle participerait à tous les travaux: chasse, cueillette, fabrication d’outils et d’objets artisanaux, serait aussi artiste et aurait déjà une bonne connaissance des herbes médicinales. Cette présentation séduisante d’une femme libre et respectée, à l’égal des hommes, est néanmoins critiquée par d’autres scientifiques qui pointent le manque de fiabilité d’un certain nombre d’études, ou d’interprétations des résultats, et qui soutiennent que cette présentation relèverait plus du fantasme que de l’état de la connaissance scientifique.

Pour en savoir plus :

• Eric Pincas, Thomas Cirotteau, Jennifer Kerner, Lady Sapiens Enquête sur la femme au temps de la Préhistoire, Ed. Groupe Margot 2021, 150 p.
• Lady Sapiens, à la recherche des femmes de la Préhistoire, documentaire réalisé par Thomas Cirotteau, 2021, 90 min. (disponible sur Francetv jusqu’au 29 nov. 2021).
• Anne Augereau, Fanny Bocquentin, Bruno Boulestin, Christophe Darmangeat, Dominique Henry-Gambier, Jean-Loïc Le Quellec, Catherine Perlès, Nicolas Teyssandier, et Priscille Touraille «Lady Sapiens, les femmes préhistoriques, d’un stéréotype à l’autre?», Le blog de Sylvestre Huet, lemonde.fr, 11 oct. 2021.

Au CEA Saclay en France (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives). Baptisé Iseult, cet équipement de pointe a été conçu et finalisé au centre de recherche sur l’imagerie médicale du CEA. L’objectif est de réaliser des avancées importantes en recherche fondamentale, dans les sciences cognitives et la connaissance des pathologies cérébrales en permettant d’étudier de manière plus fine la structure cérébrale. L’un des éléments déterminants dans cette avancée scientifique et médicale est la puissance de l’aimant qui peut atteindre une intensité de champ magnétique de 11,75 teslas alors que
les machines d’examen que l’on trouve actuellement dans les hôpitaux ont des champs magnétiques de 1,5 ou 3 teslas. Cet équipement illustre très concrètement les liens étroits qui unissent recherche fondamentale et recherche technologique trop souvent opposées l’une à l’autre alors qu’elles sont complémentaires.

En savoir plus:

• «L’IRM le plus puissant au monde livre ses premières images!», communiqué du CEA, 7 oct. 2021.
• «L’IRM le plus puissant pour observer le corps humain livre ses premières images», Sciences et avenir, 7 oct. 2021.
• «Projet Iseult : qu’est-ce que c’est?», futura-sciences.com