À travers le regard de l’un des derniers « poilus » de la Sécu, le film La Sociale revient, sur la création de notre système de sécurité sociale. Condensé d’émotions, éveilleur de conscience, outil d’éducation populaire unique, le film a soulevé l’enthousiasme autour de ce « vieux projet d’avenir » qu’est la Sécu. Jérémie Pottier-Grosman nous fait partager son expérience et nous explique à quel point les débats autour de ce film ont rendu compte de convictions communes, d’engagements à peine ensommeillés ne demandant qu’à renaître.
À l’aube du XXIe siècle, la Chine a connu un essor économique sans précédent. Le système de Sécurité sociale chinois a dû s’adapter pour répondre à l’exode massif de ruraux vers les grandes villes et au mouvement migratoire constant d’une importante partie de la population. D’importants efforts ont été fournis dans ce sens, mais les contraintes liées à la topographie de ce pays immense et le vieillissement de la population posent un problème de financement de la couverture maladie et des retraites. Mélanie Atindéhou-Laporte revient sur cette construction progressive de la protection chinoise et sur ses enjeux contemporains.
Les fondateurs de la sécurité sociale ont assis son financement sur la richesse produite dans l’entreprise. La cotisation sociale incarne ce prélèvement sur la richesse qui finance la réponse à un besoin social et non les profits. C’est un choix politique qui a été fait en 1945. Cela permet de comprendre pourquoi la sécurité sociale a été, dès sa création, attaquée violemment par le patronat. Mais aussi pourquoi les politiques de baisse du « coût du travail » visent avant tout à réduire la part de la cotisation sociale dans le financement de la sécurité sociale et à amplifier la fiscalisation de ce financement, qui repose, elle, essentiellement sur les revenus des ménages. À partir d’une lecture de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, Frédéric Rauch explique en quoi cette évolution de la structure de financement participe d’une refonte libérale de notre système de sécurité sociale. Il nous invite à mener la bataille idéologique pour défendre et promouvoir notre modèle social.
Quand on évoque la dette de la sécurité sociale, le bilan est alarmiste. Cette dette n’est pas n’importe laquelle. Elle est celle définie par le traité de Maastricht et surveillée, de très près, par la Commission européenne. Mais d’autres définitions plus complètes existent. Jacques Rigaudiat nous propose une autre analyse. En s’appuyant sur les seules prévisions officielles, il souligne que le remboursement complet de la dette sociale sera effectif en 2024, et, qu’à cette date, les ressources qui sont aujourd’hui allouées à la gestion de la dette, soit plusieurs dizaines de milliards d’euros, seront alors libres de toute affectation. Il nous invite à en mettre, dès aujourd’hui, en débat le devenir de ces fonds.
Contrairement à ce que prétendent les thèses libérales, la Sécurité sociale a un rôle économique majeur, nous rappelle Nathalie Coutinet. Grâce à sa fonction de redistribution des richesses, elle maintient un certain niveau de pouvoir d’achat pour tous. Par ailleurs, le remboursement des soins et des médicaments permet de financer l’amélioration de la santé du plus grand nombre, tandis que les prestations familiales participent au dynamisme de la natalité. Malgré ses effets bénéfiques, la sécurité sociale fait l’objet d’attaques récurrentes depuis une trentaine d’années, au prétendu motif qu’elle serait à l’origine des difficultés économiques de notre pays.
Entretien avec André Grimaldi.
Les logiques financières et managériales qui gouvernent aujourd’hui le fonctionnement de l’hôpital s’exercent au détriment de la qualité des soins et des conditions de travail des soignants. Le leitmotiv de cette gouvernance par les chiffres est de faire « toujours plus avec toujours moins ». Le passage du moindre coût pour la collectivité à la rentabilité de l’activité pour l’établissement conduit à faire de l’hôpital une entreprise commerciale comme les autres. André Grimaldi insiste sur la nécessité de penser l’hôpital à l’aune de sa vocation, celle de soigner plutôt que de gérer. Il évoque de nombreuses pistes de réformes souhaitables pour que le système de santé puisse assurer ses missions de service public et pour penser la vie démocratique dans l’hôpital.
Les inégalités persistantes entre les régimes de protection des travailleurs menacent la solidarité qui fonde la sécurité sociale et qui implique de cotiser selon ses ressources et de recevoir selon ses besoins, quel que soit le statut sous lequel est exercé le travail. Pour tendre vers l’unité, objectif initial des fondateurs de la Sécurité sociale, il faut interroger les différentes situations de travail et la manière de les traiter, afin d’apporter des prestations sociales de nature équivalente à tous les travailleurs, sans nier la spécificité de leurs besoins sociaux. Éléments d’analyse.
Présentée comme une problématique contemporaine, la question de la perte d’autonomie est en réalité l’objet d’intenses débats dès la IIIe République. Du choix de recourir à l’assistance aux échecs répétés de l’instauration d’un nouveau « risque » et/ou une nouvelle branche de la sécurité sociale, les réponses apportées n’ont pas été, et ne sont pas, à la hauteur des besoins. Christophe Capuano revient sur cette histoire et sur les raisons de ces échecs. Il nous invite à faire le choix de société de la solidarité publique assurantielle pour construire une réponse progressiste au « risque » de la dépendance.
S’il est signe d’une amélioration globale des conditions de vie, le vieillissement de la population pose aussi un défi à notre société si l’objectif est de permettre à l’ensemble des personnes en perte d’autonomie de pouvoir vivre dans de bonnes conditions. Contestant l’affirmation selon laquelle « nous n’aurions pas les moyens », Michel Limousin soutient la création d’un véritable service public pour les personnes âgées dont il précise les contours. Il indique également les différents leviers que nous pouvons mobiliser pour trouver les financements à la hauteur des besoins et des enjeux.
Les politiques publiques ne semblent pas prendre la mesure de l’enjeu que représente la santé des migrants. Ces hommes et ces femmes qui cumulent les traumatismes et dont la préoccupation principale est de survivre se heurtent à des conditions indignes d’accueil et à des aberrations administratives pour l’ouverture de leurs droits. Ils doivent souvent compter sur les infrastructures d’ONG pour espérer se faire soigner. Fort de son expérience à Médecins du monde, Christian Bensimon nous dresse un état de lieux de situation alarmante des migrants et appelle au changement de notre système de santé pour qu’il soit en mesure d’accueillir inconditionnellement et de soigner dans de bonnes conditions les exilés comme toute la population.