Amiens, rue Rigollot, plaque commémorative de l'adoption de la charte d'Amiens, le 13 octobre 1906.jpg

À propos de la charte d’Amiens

Si, depuis la naissance du syndicalisme, la question des rapports de la CGT aux partis politiques est posée, le « congrès national du travail » qui se déroule à Amiens en 1906 s’impose comme un moment important pour préciser (ou repréciser) la nature de ces relations. La Charte d’Amiens qui en découle proclame la spécificité et l’autonomie du syndicalisme et de ses organisations par rapport aux partis politiques, à l’État et au patronat. David Chaurand nous rappelle les différentes positions en présence lors de ce Congrès et nous propose une brève histoire des entorses à cette charte face aux enjeux des époques et aux réalités évolutives.

Communisme et syndicalisme… et vice versa

Sur la longue durée, la question des relations entre communisme et syndicalisme renvoie en priorité à celles entre le PCF et la CGT et, pour les années 1922-1935, celles de la scission de l’entre-deux-guerres, avec la CGTU. Elle soulève des problématiques qui traversent le XXe siècle. Dans cet article, Stéphane Sirot dépasse les notions de courroie de transmission et de subordination qui masquent les multiples dimensions de ces relations pour mettre en évidence l’écosystème existant et mouvant entre PCF-CGTU-CGT. 

Du côté des syndicats ; d’un programme à l’autre

Programmer le cours de la révolution à venir ou forger des revendications mobilisatrices sur le terrain ? Soutenir les programmes des partis de gauche ou faire des propositions autonomes ? Travailler en accord étroit avec les partis et s’autolimiter ou affirmer des identités spécifiques et ne pas se sentir engagé par les programmes des partis ? Voici quelques-unes des questions qui se sont posées au mouvement syndical depuis plus d’un siècle. Michel Pigenet nous propose une histoire du partage évolutif des tâches entre syndicats et partis.

L’arme syndicale de la lutte politique. Le cas communiste

À rebours d’une tradition française d’indépendance syndicale, l’émergence du mouvement communiste en France, au sortir de la Première Guerre mondiale, remet en cause la division du travail militant entre parti et syndicat. L’objectif est de diffuser une culture syndicale dans les rangs du parti et de promouvoir des dirigeants ouvriers. Julian Mischi revient sur cette histoire riche de leçons sur l’intérêt et la difficulté à articuler engagement syndical et combat politique. Face à une gauche qui peine à mobiliser l’électorat populaire, ce défi est toujours d’actualité.

Syndicalisme et apolitisme

Le syndicalisme dispose-t-il de la possibilité de se tenir à l’écart de la lutte pour le pouvoir ? Sous peine de se désarmer et de se rendre impuissant, il est placé devant l’obligation d’intervenir en évaluant ce que le pouvoir accomplit et en formulant des propositions. Ainsi, si l’« apolitisme syndical » revient de manière récurrente, une approche critique de l’histoire incline à le considérer comme un leurre. René Mouriaux aborde la question « sensible » des rapports du syndicalisme avec les titulaires du pouvoir d’État, en particulier avec les partis politiques et s’interroge sur les principaux facteurs de l’apolitisme syndical en France ainsi que sur sa spécificité par rapport à ses voisins européens et au syndicalisme états-unien.

La (dé)politisation des stratégies de la grève

De la grève générale révolutionnaire à la grève d’entreprise défensive, le syndicalisme français a vu son rapport à la lutte et au politique profondément se transformer. Dans cet article, Baptiste Giraud revient sur la dépolitisation progressive des stratégies syndicales, conséquence des mutations du travail et des politiques patronales, de l’atomisation des collectifs de travail et de la grande précarité de la condition salariale. Celle-ci s’est aussi nourrie de l’autonomisation vis-à-vis des partis et de l’évolution du profil des militants.  Ces dynamiques redéfinissent l’usage de la grève et la capacité des syndicats à incarner une force de transformation sociale.

La démocratie sociale entre crise du politique et nouveaux enjeux capitalistes

L’approfondissement de la crise démocratique dont témoigne la gestion de la réforme des retraites par les gouvernements successifs sourds aux revendications du mouvement social s’explique par la crise multiforme du politique, la fragilité de la démocratie sociale et l’affaiblissement du syndicalisme. Or, comme Guy Groux le démontre dans cet article, les mutations du capitalisme liées à la révolution numérique et à la transition écologique dont les effets sur le travail, l’emploi et l’entreprise sont massifs, posent de façon pressante l’enjeu de la revitalisation de la démocratie sociale et de ses agents les syndicats.

Entre luttes sociales et horizon anticolonial: la «politique des syndicats» en Guadeloupe et en Martinique

En Guadeloupe et en Martinique, les syndicats endossent une fonction politique de premier plan. Dans cet article, Pierre Odin explique comment ils sont à la croisée de plusieurs mondes : ceux du salariat, de la contestation politique, des luttes anticolonialistes et des revendications identitaires. Loin d’être une anomalie, cette configuration traduit une histoire spécifique, marquée par la colonisation, les luttes ouvrières et une quête d’émancipation toujours vivace dans un contexte où les hiérarchies sociales restent fortement racialisées.

«Être dans un syndicat, encore plus à la CGT, façonne politiquement»

Thomas Vacheron, secrétaire confédéral de la CGT, revient sur le rôle du syndicat comme contre-pouvoir indépendant au service des travailleurs dans l’entreprise, et comme outil de défense de leurs intérêts, de construction du collectif et de solidarités concrètes. Cherchant à rassembler au-delà des clivages partisans, le syndicat constitue également un rempart contre l’extrême droite, pouvant appeler à l’unité comme la CGT l’a fait lors des législatives de 2024 en soutenant le programme du Nouveau Front populaire qui offrait en outre des débouchés politiques aux luttes menées notamment contre la réforme des retraites.

«Les forces politiques doivent intégrer les exigences du monde du travail»

Caroline Chevé, secrétaire générale de la FSU, rappelle que syndicats et partis politiques n’ont ni les mêmes fonctions ni la même temporalité et que le syndicalisme ne doit pas être la courroie de transmission d’un projet politique élaboré en dehors du monde du travail, mais un espace d’élaboration collective par et pour les salarié·es. Elle défend un syndicalisme de transformation sociale, féministe et engagé dans la lutte contre l’extrême droite. Elle énumère un certain nombre de revendications syndicales qui devraient être prises en compte dans le cadre d’une alliance des partis politiques progressistes, de type « front populaire ».